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Pépite

7 questions clés pour évaluer l’efficacité d’une équipe de direction

Jacques Neatby s’intéresse depuis plusieurs années à la performance des équipes de direction. Ses travaux l’ont notamment amené à développer un outil de diagnostic de la santé des comités exécutifs. L’objectif est de balayer, à travers sept questions, les trois dimensions clés de la performance collective d’une équipe de dirigeants : l’alignement stratégique, la présence de conflits constructifs et la capacité de collaboration.

Jacques Neatby s’intéresse depuis plusieurs années à la performance des équipes de direction. Ses travaux l’ont notamment amené à développer un outil de diagnostic de la santé des comités exécutifs. L’objectif est de balayer, à travers sept questions, les trois dimensions clés de la performance collective d’une équipe de dirigeants : l’alignement stratégique, la présence de conflits constructifs et la capacité de collaboration.

Très peu de dirigeants diront le contraire : l’efficacité de l’équipe de direction est essentielle au succès de l’entreprise, car les CEO doivent pouvoir s’appuyer sur un soutien solide dans un environnement d’affaires complexe. Dirigeants et conseils d’administration devraient donc avoir pour priorité d’évaluer l’équipe de direction de leur entreprise. Pourtant, ces derniers ne font que rarement ce travail d’évaluation. Et il en va de même pour les investisseurs qui étudient souvent les antécédents individuels des top dirigeants d’une entreprise ciblée, mais rarement la façon dont ces personnes travaillent en équipe. Pourquoi ? Les plus cyniques diront que c’est parce que l’analyse est superflue tant les histoires d’équipes de leaders dysfonctionnelles abondent. Il existe toutefois d’autres raisons. En particulier, les dirigeants et investisseurs avec lesquels je discute mentionnent le manque d’outils et de temps pour évaluer l’efficacité d’une équipe de direction. C’est pourquoi nous proposons ici sept questions pour les dirigeants, les membres du conseil d’administration et les investisseurs. L’idée n’est pas de fournir un étalon de mesure précis de l’efficacité de l’équipe de direction, mais d’indiquer – rapidement et avec peu d’efforts – si la dynamique de l’équipe doit vous alerter. Ces sept questions portent sur les trois dimensions clés de l’efficacité d’une équipe de direction : l’alignement stratégique, la présence de conflits constructifs et la capacité de collaboration.

En 3 questions : les dirigeants sont-ils tous bien alignés ?
L’alignement stratégique fait référence à un consensus général entre les dirigeants sur les objectifs et l’orientation de leur entreprise.
Pour l’évaluer, vous pouvez demander aux membres de l’équipe quelle est la stratégie de leur entreprise, puis comparer leurs réponses. Mais le terme « stratégie » donnant lieu à un grand nombre d’interprétations différentes, une absence de consensus ne dénote pas nécessairement un problème d’alignement. Demander quelles sont les trois priorités stratégiques de l’entreprise pour les 12 à 18 prochains mois est généralement plus pertinent. Les réponses vous indiqueront si les membres de l’équipe travaillent tous dans
la même direction et si des tensions sur les ressources risquent d’apparaître à court terme.

Pour évaluer l’alignement des dirigeants à plus long terme, ne posez pas de questions sur la « vision » de l’entreprise, un autre terme que les membres de l’équipe peuvent interpréter différemment. Demandez-leur plutôt s’ils pensent que l’entreprise aura changé de manière notable d’ici 3 à 5 ans. Et si oui, comment.

Si les réponses des membres de l’équipe à ces deux questions diffèrent de celles de leur dirigeant, vous êtes face à un problème d’alignement. Toutefois ce n’est pas parce que les réponses se rejoignent que l’alignement est bon : peut-être les membres de l’équipe se contentent-ils de répéter la position exprimée par leur dirigeant. Sondez alors les répondants plus avant en demandant par exemple à chacun de justifier ses réponses. S’ils ont du mal à le faire, le consensus apparent est sans doute superficiel et l’alignement non-optimal. Si l’équipe de direction est suffisamment grande (à partir de 7 membres), vous pouvez également leur demander quels sont les 2 ou 3 membres qui ont le plus de pouvoir dans l’équipe. Cette question est importante parce qu’un alignement parfait est rare dans les équipes de grande taille. L’objectif est alors de savoir si les poids lourds sont bien en phase avec le dirigeant. Soyez particulièrement attentif à ceux qui affirment que tous les membres de l’équipe sont sur un pied d’égalité, car ce sont souvent les plus puissants qui minimisent les disparités de pouvoir. Vous devez vous montrer prudent lorsque vous posez des questions sur le pouvoir, en particulier dans les environnements très égalitaires ou au contraire très hiérarchisés où la question peut être taboue. Dans de tels contextes, demander quels sont les membres ayant le plus d’influence, plutôt que ceux ayant le plus de pouvoir, est généralement plus judicieux.

QUESTIONNAIRE D’ÉVALUATION DE L’ÉQUIPE DE DIRECTION

Alignement stratégique
1. Quelles sont les 3 priorités stratégiques de votre entreprise pour les 12 à 18 prochains mois ?
2. Pensez-vous que votre entreprise aura changé de manière notable d’ici 3 à 5 ans et, si oui, comment ?
3. Quels sont les 2 ou 3 membres qui ont le plus de pouvoir dans l’équipe de direction ?

Présence de conflits constructifs
4. Quels membres de l’équipe forment la garde rapprochée du CEO ?
5. Ces personnes sont-elles prêtes à s’opposer à leur supérieur ?

Capacité de collaboration
6. Quel(s) binôme(s) doit/doivent le mieux collaborer pour assurer la réussite de l’entreprise ?
7. À quelle fréquence les dirigeants que vous avez identifi és communiquent-ils entre eux et par quels moyens ?

 

En 2 questions : les conflits
constructifs sont-ils valorisés dans l’équipe de direction ?

Les conflits dans une équipe de direction sont non seulement inévitables, mais aussi souhaitables. Ainsi, le dirigeant doit encourager les débats constructifs entre les membres de son équipe et, plus important encore, les encourager à s’opposer à lui, responsable en bout de chaîne des grandes décisions (qu’il ne devrait cependant pas prendre seul).

Chaque membre de l’équipe de direction doit-il se sentir libre de s’opposer au dirigeant ? Non, mais au moins un membre – que le dirigeant écoute – doit être prêt à affronter le chef. Aussi, ne demandez pas si certains membres de l’équipe sont prêts à s’opposer au dirigeant, (car ceux qui le sont ne seront pas forcément les plus écoutés), mais quels membres forment la garde rapprochée du CEO, c’est-à-dire ceux qu’il consulte généralement pour ses décisions importantes. Même s’il peut nier avoir un tel cercle de confiance, les membres de son équipe de direction n’hésiteront pas à vous donner les noms. Enchaînez alors en essayant de savoir si ces personnes sont prêtes à s’opposer à leur supérieur. Validez les réponses en observant, si vous en avez l’occasion, comment ils interagissent avec le dirigeant dans le cadre d’une prise de décision.

Les dirigeants doivent pouvoir s’appuyer sur un soutien solide dans un environnement d’affaires complexe.

En 2 questions : quelle est la capacité de collaboration de l’équipe ?

Si les membres de l’équipe de direction doivent s’opposer au dirigeant (et les uns aux autres) dans les premières phases de la prise de décision, ils doivent ensuite parvenir à collaborer pour définir et mettre en place les solutions servant au mieux l’entreprise. Une idée, pour comprendre si les membres d’une équipe collaborent bien entre eux, serait de les observer dans un contexte informel pour voir comment « ils s’entendent ». Toutefois, le fait de « bien s’entendre » peut cependant signifier qu’ils refuseront de s’opposer les uns aux autres. Par ailleurs, bon nombre de dirigeants ne ressentent pas le besoin de bien s’entendre et la collaboration dans une équipe de direction n’est peut-être pas aussi conviviale et confortable que ce que décrit la littérature ou que ce qui s’observe aux échelons inférieurs de l’entreprise.
Mais alors à quoi ressemble une collaboration efficace au sein d’une équipe de direction ? Il n’existe pas de recette universelle et les collaborations ne créent pas toutes la même valeur. Aussi, demandez quels binômes doivent le mieux collaborer pour assurer la réussite de l’entreprise et à quelle fréquence les dirigeants que vous avez identifiés communiquent-ils entre eux et par quels moyens. Des répondants ayant du mal à décrire comment et à quelle fréquence les collaborateurs clés communiquent constituent un signal d’alerte. Enfin, vous pouvez vérifier s’il existe des obstacles à la collaboration. Ceux-ci peuvent être nombreux et de différentes natures : attributions de responsabilités qui se chevauchent, déclenchant des guerres intestines, programme de rémunération mal structurés qui découragent la coopération, etc. Toutefois, selon notre expérience, la barrière à la collaboration la plus importante est un manque d’alignement stratégique et celle-ci est prise en compte par les trois premières questions proposées dans cet article.
Pour conclure, évaluer individuellement les membres d’un comex ne suffit pas pour vérifier son efficacité, car même constituée d’éléments brillants, une équipe n’est pas toujours brillante. Ces sept questions peuvent aider à poser un premier diagnostic sur le fonctionnement de l’équipe dans son ensemble et ainsi déterminer si une évaluation plus en profondeur s’impose.

1. L’expérience démontre que préciser le nombre de trois priorités permet d’éviter que les répondants ne se figent si aucun chiffre indicatif n’est donné ou, a contrario, ne se lancent dans des énumérations de six ou sept priorités, voire plus.

L’auteur

JacquesNeatby
Jacques Neatby
Associé, MindLab Global Solutions, Canada, mars 2017. Consultant spécialisé dans l’alignement des équipes de direction et la collaboration pour des multinationales nord-américaines et européennes, Jacques Neatby intervient à HEC Paris et dans le cadre du programme EMBA McGill-HEC Montréal sur l’efficacité des équipes de direction. En outre, il publie régulièrement des articles sur ce sujet, notamment sur le site de la Harvard Business Review.

 

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Mehdi Ramdani
Publié par Mehdi Ramdani